L'intérêt pour la construction circulaire se développe petit à petit en Belgique (ce site en est d'ailleurs la preuve). Mais cela ne veut pas dire pour autant que la construction circulaire est un concept récent. Dans cette rubrique Circul'Hier, Kris Blykers, du bureau d'architectes Blieberg, reviendra régulièrement sur des projets circulaires (parfois très) anciens. Le premier article de cette série est consacré au Pont Bailey, un pont préfabriqué portatif imaginé par Donald Coleman Bailey pendant la seconde guerre mondiale.
Chaque fois qu'il y a eu des urgences à résoudre dans l'histoire, la créativité et une approche circulaire ont souvent apporté une réponse efficace. Au début de la Seconde Guerre mondiale, le pont à portatif à usage militaire a été inventé en Angleterre par Donald Coleman Bailey. L'assemblage des différentes pièces du pont ne nécessitait aucun outil spécial. En quelques heures seulement, le pont pouvait être assemblé par de simples soldats. Cet avantage jouera un rôle-clé dans la victoire des Alliés. Grâce à ce pont préfabriqué et portatif, les troupes alliées ont pu avancer plus rapidement. Le maréchal Montgomery a d'ailleurs déclaré que ses opérations militaires avec la 8e armée en Italie et la 21e armée dans le nord-ouest de l'Europe n'auraient jamais pu avancer aussi vite sans les ponts Bailey. L'invention de Bailey peut être considérée comme l'une des premières solutions de construction circulaire.
Les ponts ont été utilisés pour transporter des troupes, des chars et des armes par-delà les rivières et les gorges, par exemple lors du débarquement allié en Normandie. Il est clair que la rapidité et la simplicité du montage étaient cruciales car un pont devait souvent être construit sous les tirs de l'armée ennemie.
Il est également clair que le concept ne pouvait être qu'une solution universelle, car il était impossible de prédire à l'avance où un pont serait nécessaire. L'élément-clé de ce concept résidait dans les panneaux latéraux de soutien ou les garde-corps du pont, construits à partir d'une trame en acier en forme de losanges. Ils mesuraient 3 m de long, 1,5 m de haut mais ne pesaient que 260 kg. Il fallait donc 6 hommes et un marteau pour les assembler. La légèreté était déjà l'une des principales caractéristiques de la construction circulaire.
Les panneaux étant de conception simple et de taille standard, cela permettait aux éléments d'être totalement interchangeables. Ils pouvaient être fabriqués dans n'importe quelle usine, dans toute l'Angleterre. Aujourd'hui, l'interchangeabilité et la standardisation sont des critères importants pour la construction circulaire.
Les soldats n'étaient pas des travailleurs qualifiés. Le concept devait donc être simple à mettre en œuvre. Les panneaux étaient assemblés l'un derrière l'autre et fixés en insérant des chevilles dans les trous mâles et femelles. C'est ainsi que sont apparus les garde-corps porteurs. Le tablier du pont était formé de barres métalliques transversales qui soutenaient les garde-corps. Selon la portée et la résistance à atteindre, ces éléments étaient boulonnés côte à côte en rangée double ou triple et/ou entassés verticalement les uns sur les autres. Aujourd'hui encore, la simplicité et la modularité sont inextricablement liées à la construction circulaire.
Les ponts pouvaient être construits sans supports intermédiaires, échafaudages ou grues, en utilisant la méthode Cantilever : le tablier était constitué de poutres construites en porte-à-faux. Seuls quelques hommes et un camion suffisaient pour accéder au ravin ou franchir une rivière. Une conception intelligente est donc également primordiale dans la construction circulaire. La meilleure preuve en est que le concept de Bailey a encore été utilisé tout récemment pour construire l'hôpital temporaire de Leishenshan en Chine, afin de faire face à l'augmentation du nombre de patients touchés par le Covid-19.