Le nouvel immeuble de bureaux de la Banque Triodos à Zeist (Pays-Bas) est circulaire sous de nombreux aspects. Il est constitué de matériaux et de connexions circulaires, a été conçu de façon circulaire et son implantation est également circulaire. Avec ce nouveau siège, la Banque Triodos veut aussi jouer un rôle de catalyseur dans la transition vers la construction circulaire. Lors d’une récente visite guidée, quelques conférenciers ont expliqué en détail ce que la construction circulaire signifie et implique réellement.
Toutes les personnes présentes lors de la visite n’avaient pas la même définition du concept de construction circulaire. Pourtant, même celles qui étaient déjà bien informées ont écouté religieusement et avec professionnalisme les intervenants. Car la présentation des divers conférenciers a permis de donner un aperçu précis de la situation actuelle dans le domaine de la construction circulaire.
Nous avons voulu partager les découvertes les plus intéressantes de cette journée sur architectura.be. Nous voulons insister ce que la construction circulaire signifie et implique, car nous sommes occupés à créer un tout nouveau site Web, circubuild.be, qui sera mis en ligne d’ici quelques mois. Ce site internet fait partie d'un projet plus global dans lequel nous souhaitons mettre à l’honneur la construction circulaire et encourager tous les professionnels à se mettre le plus rapidement possible à construire de manière circulaire.
Des dizaines de définitions
La construction circulaire est un concept dont on parle de plus en plus et il en existe des dizaines de définitions. Ce n'est pas surprenant, car le problème réside en réalité dans le terme même. Car la construction circulaire ne concerne pas uniquement le processus constructif, mais également la phase de conception et la manière dont vous utilisez ou gérez un bâtiment, voire le financez. Toutes ces questions devraient idéalement être inclues dans la définition.
Un cycle fermé
Il intéressant de voir et de comprendre d'où vient le principe ; Il s'agit en fait de la mise en œuvre spécifique d'un changement de mentalité beaucoup plus vaste qui s'est développé ces dernières années au sein de l'économie. L'économie circulaire a vu le jour comme réponse à la pollution atmosphérique, aux émissions de CO2, au réchauffement de la planète et à l'épuisement des ressources naturelles, qui ne cessent de croître. Dans ce modèle économique, qui est directement opposé à l'économie linéaire ou ‘jetable’, les matières premières, les matériaux et les produits ne sont jamais jetés, mais réutilisés plusieurs fois. C'est une économie qui fonctionne idéalement sans nouvelles matières premières et ne produit donc pas de déchets, car les déchets ne sont que de nouvelles matières premières, et ainsi de suite. Cela peut être fait par le recyclage, la réhabilitation, voire la valorisation (upcycling), lorsque la matière première recyclée a une valeur supérieure à celle de la matière première d'origine. En d'autres termes, le cycle est fermé… la boucle est bouclée dans tous les sens du terme. L'économie circulaire propose également de nouveaux modèles commerciaux et une manière différente de collaborer et d'entretenir des relations avec les clients.
‘Product as a service’
L’évolution vers une économie circulaire a aussi, logiquement, un impact sur le secteur de la construction. Après tout, celui-ci est responsable de 40% des déchets générés dans le monde. Et bien que l'environnement bâti ait réduit ses émissions de CO2 ces dernières années, le secteur de la construction est toujours responsable d'un pourcentage important des émissions mondiales de CO2 résultant de la production de matériaux de construction et des transports de ces matériaux. Pour les bâtiments aussi, la circularité signifie que le cycle des matières premières et des matériaux sera fermé, pour toujours. Il va de soi que les matériaux utilisés doivent idéalement être aussi durables que possible et donc de préférence biosourcés, comme le bois, qui ne contient aucune substance nocive et, s'il provient d'une forêt gérée de manière durable, est renouvelable.
Mais la construction circulaire va encore plus loin que la simple réutilisation de matières premières : il doit en être de même pour l’énergie, l’eau, la nourriture… Naturellement, cela exige que le secteur de la construction adopte des façons de penser et de travailler différentes. Il faut que les producteurs ne soient pas uniquement responsables de la livraison des matériaux, mais également de leur récupération après utilisation. C’est dans cette optique que le concept ‘produit en tant que service’ (product as a service) est apparu. Ici, l’utilisateur n’achète plus le produit - une chaudière, des luminaires, des meubles… - mais utilise le service proposé par ce produit : la chaleur, la lumière, l’utilisation du mobilier.
La construction circulaire va encore plus loin que la simple réutilisation de matières premières : il doit en être de même pour l’énergie, l’eau, la nourriture…
Passeports matériaux
Si nous voulons réutiliser des parties de bâtiments, il est important de bien connaître les matériaux et les produits réutilisables mis en œuvre dans ces bâtiments. Aujourd'hui, heureusement, ces composants reçoivent de plus en plus souvent un ‘passeport matériau’ pour faciliter leur reprise et leur réutilisation. La numérisation joue un rôle important à cet égard. Différentes plateformes existent, qui servent de bibliothèque et de générateur pour les ‘passeports matériaux’. L’idéal est bien entendu de rendre un bâtiment complètement démontable, de sorte qu'il fonctionne comme une banque de matériaux. Une condition absolue pour atteindre cela est que les divers matériaux restent aussi purs que possible. Pour ce faire, il ne faut pas assembler les pièces avec de la colle, du mastic, du ciment ou du PUR, mais en utilisant des systèmes de vissage et d’emboîtement réversibles, et en rendant également ces systèmes facilement accessibles. Il va sans dire que cela offre des perspectives intéressantes pour les maîtres d’ouvrages et autres architectes. Comme un enfant réalisant de nouvelles constructions sur base des mêmes blocs de LEGO, il peut mettre en œuvre de nouveaux projets avec de vrais matériaux de construction.
Comme un enfant réalisant de nouvelles constructions sur base des mêmes blocs de LEGO, il peut mettre en œuvre de nouveaux projets avec de vrais matériaux de construction.
Construction orientée vers le changement
Le terme de ‘construction circulaire’ est souvent associé à celui de ‘construction orientée vers le changement’. Pour beaucoup, il s’agit même d’un synonyme. Mais ce n'est pas tout à fait exact. La construction orientée vers le changement est, à côté du cycle fermé des produits et matériaux, un deuxième principe essentiel de la construction circulaire et signifie qu'un bâtiment est conçu de manière à pouvoir être utilisé de manière flexible, ce qui garantit sa durée de vie. Exemple concret : un maître d’ouvrage envisage en général une durée de vie de 15-20 ans pour un immeuble de bureaux. Après cela, pour lui, le bâtiment n'a plus aucune valeur car il a rentabilisé son investissement. Il arrive même souvent qu’au bout de ces 15-20 ans, l’immeuble commence à tomber en ruines et soit obsolète pour un éventuel nouvel occupant. Toutefois, si la durée de vie est déjà prise en compte dès la phase de conception, ce problème peut être évité. En rendant les murs intérieurs démontables et faciles à déplacer, par exemple, ou en prévoyant les prises de courant et les tuyaux de manière à ce que l'immeuble de bureaux puisse recevoir par la suite une fonction résidentielle, il est possible de prolonger considérablement la durée de vie d'un bâtiment et l'immeuble restera économiquement intéressant plus longtemps pour le maître d’ouvrage.
Un nouvel immeuble de bureaux 100% démontable !
Le nouveau siège de la Banque Triodos à Zeist (Pays-Bas) est un très bon exemple de construction circulaire. Il est circulaire et durable sous toutes ses facettes. Le bâtiment est démontable à 100%. Conçu comme un dépôt de matériaux, il peut être parfaitement déconstruit et reconstruit à un autre endroit. La structure du bâtiment est composée à 90% de bois. Même la cage d'ascenseur est en bois, ce que presque personne n’imaginait possible. La structure est maintenue avec 165 000 vis et boulons, aucune pièce n’a été collée. On accède très facilement à toutes les fixations et à toutes les connexions. Le bâtiment dispose d'un système de chape sèche en bois et les murs intérieurs peuvent être déplacés comme on le souhaite. L'ensemble du bâtiment étant enregistré sur Madaster (une des plateformes de matériaux), le nouvel immeuble de bureaux de la Banque Triodos est le seul au monde dont la valeur matérielle globale peut être déterminée précisément à tout moment.
Le nouvel immeuble de bureaux de la Banque Triodos est le seul au monde dont la valeur matérielle globale peut être déterminée précisément à tout moment.
Implantation durable dans son environnement
La durabilité ne dépend pas seulement des matériaux utilisés ou de l'adaptabilité de la fonction du bâtiment, mais également de l’implantation de ce bâtiment. Le nouvel immeuble de bureaux a été intégré de manière optimale dans De Reehorst, un lieu privilégiant l’équilibre entre la nature, la culture et l’économie. Au début de la phase de conception, diverses études ont été menées en lien avec l'écologie, l'histoire culturelle, l'archéologie, les arbres, l'eau et la circulation. Les résultats de ces études ont été inclus dans la conception finale. Par exemple, lors de la détermination de l'emplacement du nouvel immeuble de bureaux, on a pris en compte les trajectoires de vol des chauves-souris sur le domaine en prévoyant une distance minimale de 10 m avec la lisière de la forêt. De même, la hauteur de l'immeuble a été limitée à 25 m, en raison des zones arborées toutes proches et le bâtiment n'est qu'à quelques minutes à pied de la gare de Driebergen-Zeist, afin que l'utilisation des transports en commun soit encouragée.
Au début de la phase de conception, diverses études ont été menées en lien avec l'écologie, l'histoire culturelle, l'archéologie, les arbres, l'eau et la circulation. Les résultats de ces études ont été inclus dans la conception finale.
Les façades en verre garantissent une entrée optimale de la lumière du jour et, combinées avec les toits verts, garantissent une relation étroite avec le paysage. La faune et la flore présentes sur le domaine ont été cartographiées par une personne qualifié. En consultation avec les architectes paysagistes d'Arcadis, une recommandation a été formulée pour chaque activité constructive en relation avec les besoins de la faune et de la flore existantes. La végétation qui devait absolument être enlevée a été déplacée ou compensée. Le bois des arbres abattus a été d’une manière ou d’une autre réutilisé dans le bâtiment.